Recevoir son salaire en pleine formation, voilà un scénario qui déroute plus d’un salarié. Le CPF, ce compte personnel de formation, bouscule les habitudes et redistribue les cartes : s’absenter pour apprendre, tout en comptant sur sa rémunération. Mais qui signe le chèque pendant cette parenthèse ? Penchons-nous sur la mécanique du financement.
L’employeur : un rôle central dans la rémunération
Pour les salariés d’entreprise, la règle est claire : l’employeur reste le premier interlocuteur lorsqu’il s’agit de verser le salaire pendant un départ en formation via le CPF. La législation impose aux entreprises de garantir la paie de leurs collaborateurs, à condition que la demande respecte le Code du Travail et suive la procédure établie.
Concrètement, le salarié continue de percevoir sa rémunération pendant sa formation. Ce versement lui assure stabilité et tranquillité d’esprit, même s’il quitte temporairement son poste. Mais cette continuité ne va pas sans conditions : la demande doit être faite dans les temps, le contenu de la formation doit coller aux critères définis, et l’accord de l’employeur reste déterminant.
OPCA et financement : une mécanique parfois indirecte
Entrent alors en scène des acteurs moins connus, mais décisifs : les OPCA (Organismes Paritaires Collecteurs Agréés), aujourd’hui remplacés par les OPCO. Leur mission ? Collecter et gérer les fonds dédiés à la formation, financer les frais pédagogiques, et parfois même prendre en charge la rémunération.
Dans certains cas, le paiement du salaire pendant la formation n’est plus assuré directement par l’employeur. Tout dépend du type de contrat CPF souscrit. Si l’entreprise a signé un accord spécifique avec son OPCO, la rémunération peut transiter par cet organisme : l’employeur verse les fonds à l’OPCO, qui les redistribue ensuite au salarié pendant sa formation.
Ce montage est fréquent lorsque l’employeur est à l’origine de la démarche de formation et souhaite s’appuyer sur les dispositifs de branche. Mais au final, l’argent provient toujours de l’entreprise : l’OPCO ne fait que jouer le rôle d’intermédiaire.
La demande CPF : démarches et obligations
Pour bénéficier du maintien de son salaire, le salarié doit prévenir son employeur par courrier formel, en précisant tous les éléments de la formation : intitulé, durée, lieu, dates. Cette lettre n’est pas une simple formalité : elle déclenche le processus administratif qui garantit le maintien de la rémunération.
Dans certains cas, une information parallèle est à fournir à l’OPCO dont dépend l’entreprise. Négliger ce point peut compliquer la prise en charge, voire la faire capoter. Mieux vaut donc préparer sa demande avec soin.
Demandeurs d’emploi : continuité dans la rémunération
Pour les demandeurs d’emploi, le mécanisme change, mais l’objectif reste le même : garantir un revenu pendant la formation. Ceux qui touchent l’ARE (allocation de retour à l’emploi) continuent de la percevoir tant que dure leur formation CPF. Cette allocation, versée à intervalles réguliers, prend alors la forme d’un salaire provisoire, permettant de traverser cette période de transition sans rupture brutale de ressources.
Travailleurs indépendants : des règles spécifiques
Pour les indépendants, le financement du CPF s’avère plus complexe. Ne relevant pas d’un OPCO, ils ne cumulent pas d’euros sur leur compte CPF de la même manière que les salariés. Pourtant, eux aussi peuvent accéder à des formations qualifiantes ou certifiantes pour renforcer leurs compétences et sécuriser leur avenir professionnel.
Dans la pratique, l’indépendant finance généralement sa formation sur ses propres ressources, sauf s’il bénéficie d’un soutien de structures comme Pôle Emploi, ou, pour les artistes-auteurs, de l’Afdas. Certains réseaux d’accompagnement dédiés aux entrepreneurs proposent aussi des solutions adaptées, à explorer selon la situation de chacun.
Autre piste : la contribution volontaire au CPF. Depuis 2018, les travailleurs indépendants peuvent choisir de verser eux-mêmes une somme chaque année, transformée en heures de formation selon un barème officiel. Ce levier permet d’alimenter progressivement leur droit à la formation, sans dépendre d’une organisation extérieure.
Multiplier ces opportunités, c’est ouvrir la porte à de nouveaux horizons professionnels. Pour les indépendants, le CPF devient un atout pour évoluer, s’adapter, et parfois rebondir.
Formations CPF : quelles sont les conditions de prise en charge ?
Le CPF a été conçu pour permettre à chacun, salarié ou demandeur d’emploi, de suivre des formations professionnelles afin de renforcer son expertise ou de changer de cap. Mais l’accès à ce dispositif repose sur plusieurs conditions à respecter scrupuleusement.
D’abord, la formation doit figurer au catalogue officiel des formations éligibles, disponible sur le site gouvernemental dédié. Ce point n’est pas négociable : une formation non référencée ne pourra être financée par le CPF.
Ensuite, la démarche doit s’inscrire dans un projet professionnel validé, par l’employeur pour les salariés, par Pôle Emploi pour les demandeurs d’emploi. Il s’agit de prouver la cohérence de la formation avec l’évolution envisagée. Le salarié doit présenter ce projet à son employeur, argumenter sa demande et obtenir l’accord avant de s’engager.
Certains points concrets encadrent ce dispositif :
- La durée maximale d’une formation financée via le CPF ne peut excéder 1 500 heures.
- La contribution financière de l’employeur est plafonnée à dix fois le montant annuel maximal prévu pour la formation continue obligatoire.
La rémunération est assurée lorsque la formation se déroule pendant le temps de travail. À l’inverse, si elle a lieu hors temps de travail ou durant une suspension de contrat (comme un congé), le salarié n’est pas payé pour cette période. Ce détail, loin d’être anecdotique, doit être anticipé avant de s’engager.
En respectant ces règles, chacun peut utiliser le CPF pour bâtir son avenir professionnel, sans risquer de se retrouver sans ressources. Encore faut-il s’y préparer, car le CPF, comme toute passerelle, exige de savoir où l’on met les pieds.
Changer de cap, progresser ou simplement se sécuriser : le CPF redessine les trajectoires professionnelles, mais ne fait pas de miracle. La rémunération suit, à condition de jouer la bonne partition, au bon moment. Qui finance ? L’employeur, l’organisme de collecte, ou l’État, parfois les trois à la fois. À chacun de trouver sa voie dans ce labyrinthe, pour que le droit à la formation reste une promesse tenue.

